Fondée en 2011, la biotech picarde Root Lines Technology a réuni les fonds nécessaires au développement d’un programme de recherche-développement qui pourrait révolutionner le traitement de certaines maladies rares. Un espoir pour les patients.
La maladie de Gaucher est l’une des 50 maladies lysosomales recensées
Vous ne regarderez peut-être plus les navets du repas de dimanche de la même manière : un temps réputé fade avant de rentrer en grâce, ce légume typique des tables européennes cache dans ses racines des qualités qui pourraient bien en faire les meilleurs alliés de patients atteints de maladies encore difficilement curables.
Tout commence en 2010, lorsque les équipes du professeur Michèle Boitel, la responsable du DUT Génie biologique (option industries agroalimentaires et biologiques) de l’Université Picardie Jules-Verne (UPJV), développent un procédé de production de protéines humaines à base de racines de navets. L’année suivante, la société Root Lines Technology est fondée avec le soutien de l’ex-Région Picardie et de BpiFrance pour en exploiter le potentiel sous licence exclusive mondiale, au terme d’un premier tour de table. En 2014, la jeune start-up décide de passer à la vitesse supérieure. Dirigée par Marina Guillet, la biotech amiénoise se lance dans un important programme de recherche-développement avec une idée en tête : augmenter sa valeur ajoutée en développant de nouveaux produits usage thérapeutique.
Super navet
Dans leur viseur, les chercheurs ciblent plus précisément trois affections rares, dont les maladies lysosomales. Souvent génétiques, ces maladies affectent le fonctionnement du cytoplasme, cette partie de la cellule qui contient les enzymes chargés d’éliminer ses déchets. Son programme repose sur la capacité de certaines bactéries à transférer une partie de leur génome dans les gènes d’une plante. En l’occurrence, notre fameux navet, retenu pour sa capacité à développer un système racinaire secondaire, capable de vivre indépendamment de la plante : le chevelu racinaire, pour ceux qui souhaiteraient épater leur beaux-parents au prochain repas de famille. En introduisant un gène humain dans la bactérie, il devient possible de faire littéralement migrer celui-ci dans ces racines, amenant ces dernières à produire une protéine humaine utilisable dans certains traitements. Le tout au terme d’un processus moins lourd et moins coûteux que les procédés existants, à base de cellules de mammifères ou de levures, puisque les racines peuvent être cultivées en laboratoire, sans apport de chaleur ou de lumière.
A terme, cette piste est un enjeu essentiel pour des patients certes peu nombreux – un individu sur 100.000 en Europe – mais dont l’espérance de vie ne dépasse guère une quinzaine d’années aujourd’hui.
Nouveau tour de table
Reste pour Root Lines Technology à passer du stade de la recherche à celui de la production. Pour finir de convaincre les partenaires pharmaceutiques qui ont déjà fait part de leur intérêt, la spin-off de l’UPJV vient de lever au printemps dernier une somme de deux millions d’euros auprès de Picardie Investissement et de partenaires privés. Le succès de cette augmentation de capital doit permettre à la jeune société de financer les prochaines étapes, à commencer par le long chemin qui permettra de démontrer que les caractéristiques des protéines développées sont correspondent bien aux attentes. Prévue pour la fin de cette année, cette étape précédera la construction de partenariats avec les entreprises pharmaceutiques, programmés pour fin 2017.