Si le pouvoir politique australien s’est installé à Canberra, Sydney fait incontestablement figure de capitale économique et commerciale du continent. Avec 5 millions de citadins, la ville-hôte des Jeux Olympiques du troisième millénaire, en 2000, ne se repose pas sur ses lauriers mais affirme son ambition : devenir l’une des plus grandes Smart Cities du monde, d’ici moins de quinze ans.
Sydney, ville durable ? Le concept ne date pas d’hier. En 2007, la ville s’est lancé dans un vaste pari destiné à transformer l’ensemble de son territoire – 12 300 km² tout de même – en gigantesque laboratoire d’une transition urbaine durable, « Sustainable Sydney 2030 » (site en anglais), capable de dessiner une métropole « green, global and connected » – verte, globale et connectée. Un slogan qui n’est pas sans rappeler la démarche rev3…
Des habitants écoutés
Ses 5 millions d’habitants, les Sydneysiders, ont été interrogés à grande échelle dans le cadre d’une vaste consultation publique longue de 18 mois. Au cours de cette période, la ville a consulté tous azimuts pour mesurer les attentes de l’ensemble des quartiers et des communautés d’une métropole célèbre pour la diversité de sa population. Simples citoyens, associations, chefs d’entreprise, organisations, militants et jusqu’aux touristes… Autant d’habitants ou de visiteurs interrogés au travers d’une quarantaine de conférences, d’un serveur téléphonique (le Future Phone, ou téléphone du futur…) et d’un site web dédiés, et sensibilisés au programme via une exposition destinée à expliquer les enjeux de la démarche. Et ça marche : l’expo a réuni 130 000 visiteurs au bas mot et plus de 12 000 personnes ont déposé leurs propositions au cours des réunions publiques.
Autre preuve de la volonté d’inclure la totalité de la population, Sydney s’est appuyée dans la construction de sa démarche sur les représentants des communautés aborigènes, reconnues dans l’introduction du programme « Sustainable Sydney 2030 » comme les premiers peuples de l’Australie – une démarche appréciée dans un pays longtemps accusé de ne pas assumer son passé colonial. La démarche n’est pas uniquement symbolique, puisque la ville s’engage à monter des partenariats et des projets avec les communautés aborigènes dans l’idée de favoriser leur intégration.
Cinq changements majeurs
Logement, énergie, innovation, culture, architecture, déplacements, transports, créativité… Autant de thématiques évoquées sans tabous dans une perspective calée sur les trois piliers du développement durable : si l’aspect environnemental est central, la ville accorde une importance égale aux volets économique et social. Au terme de la consultation, l’ambition initiale s’est transformée en programme d’actions concrètes. Feuille de route volumineuse et détaillée, il comprend une dizaine d’orientations stratégiques et autant d’objectifs chiffrés, identifie une dizaine de projets majeurs de réaménagement urbains et repère cinq grands changements majeurs, les « big moves ».
Le premier consiste à renforcer le centre-ville de la métropole pour le rendre plus dynamique et plus attractif. Au programme, la création de nouveaux espaces publics et la multiplication de places fermées à la circulation automobile, mais aussi un soutien sans faille au développement des entreprises, des commerces ou des start-up… Sans oublier pour autant les autres quartiers : le programme parie sur un équilibre socio-territorial global travaillant le concept de « villages », chaque quartier disposant en somme de son propre mini-centre-ville dotés de tous les services publics nécessaires. Pour valoriser les initiatives des quartiers, la ville a conçu les « Sydney Culture Walks », une application dont les dix parcours dessinent une déambulation conçue pour à faire découvrir 400 lieux originaux sur le plan culturel ou artistique.
Autre thème, la question des transports urbains et l’ambition de repenser la mobilité dans la métropole, de désengorger les grands axes et de limiter le recours aux voitures individuelles. Le programme prévoit le remplacement du réseau de bus par des tramways moins polluants, la promotion de l’autopartage et des déplacements doux, du vélo à la marche, favorisés par la création d’un réseau à part, réservé aux cyclistes et aux piétons et séparé des axes routiers. La ville a par ailleurs commencé à donner l’exemple en se dotant d’une flotte de véhicules publics 100 % hybride ou électrique et en finançant l’installation d’un vaste tissu de bornes de recharges.
Côté environnement, la ville souhaite répondre aux souhaits exprimés par les habitants en remettant du vert dans la ville. Les parcs publics s’étendent progressivement, 800 arbres supplémentaires sont plantés chaque année et Sydney encourage ses habitants à planter leur propre potager dans leurs jardins, en s’inspirant des techniques déployées dans la City Farm spécialement mise en place.
Plus globalement, la municipalité souhaite maîtriser son développement urbain et son bilan énergétique. D’où l’attention particulière apportée aux programmes de réduction d’énergie et la myriade d’aides et de projets destinés à favoriser la production d’énergie locale renouvelable, solaire ou éolienne. Un défi et une ambition à la mesure d’une ville qui devrait accueillir un million de citoyens supplémentaires d’ici dix ans…