Des bâtiments verts, qui produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment ? C’est très rev3 et les Hauts-de-France abritent déjà plusieurs de ces BEPOS – pour Bâtiment à Énergie positive. Après deux premiers volets consacrés aux Archives du Nord et à Arteparc, le troisième épisode se tourne vers Béthune, où l’IUT s’est lancé dans un projet audacieux, baptisé EITRE pour « Écosystème intégré pour la transition et la réhabilitation énergétique ».
Béthune, mai 2014. Dans la lignée de la démarche de Troisième révolution industrielle portée par la CCI Nord de France et l’ex-région Nord Pas-de-Calais, l’IUT décide de s’engager dans l’une des plus étapes les plus ambitieuses de son histoire depuis sa naissance en 1968 : le projet EITRE.
L’idée ? Lancer l’éco-rénovation d’une partie de ses 22 000 mètres carrés. Sortis de terre à la fin des années 60, conçus avant la prise de consciences des enjeux climatiques actuels, les bâtiments ont l’âge de leurs artères, avec à la clef des conséquences non négligeables sur la facture énergétique de l’IUT. Problématique, à l’heure où l’IUT, comme tout l’enseignement supérieur, doit apprendre à composer avec la tendance à la baisse de ses financements publics.
Si la volonté d’aller vers une réhabilitation globale – à la fois structurelle, énergétique et fonctionnelle – d’une aile entière est arrêtée, reste à donner corps à l’ambition affichée. Ce qui n’a rien de simple sur le plan du financement comme sur celui de l’organisation pratique d’un chantier de cette envergure, dans un bâtiment où étudiants, chercheurs et enseignants circulent une bonne partie de l’année.
D’où l’idée de distinguer trois phases distinctes, échelonnées dans le temps. La première, budgétée à 4,5 millions d’euros, concernera la peau du bâtiment et portera sur son isolation extérieure tout en s’attachant à améliorer la qualité d’air intérieur. La deuxième (3,5 millions d’euros) est conçue pour faire de l’IUT un bâtiment producteur d’énergies renouvelables. La dernière, budgétée à 3 millions d’euros, sera consacré à la réhabilitation fonctionnelle intérieure, avec un réaménagement de fond en comble des salles de cours et des labos. Au terme de ce processus, l’IUT devrait pouvoir dépasser les standards du label BBC Rénovation et tendre vers les seuils requis au niveau BEPOS-Effinergie, soit 40 kWh par an et par mètre carré.
Question planning, « EITRE est programmé pour plusieurs années, de 2015 à 2020 », rappelait le 2 mars dernier le directeur de l’IUT Daniel Ammeux à l’occasion de la visite organisée dans le cadre de la Semaine du développement durable. Et de pointer l’ambition à long terme du projet : « faire de l’IUT un démonstrateur reproductible ailleurs, inscrit dans le cadre de la dynamique rev3. »
Réhabilitation, innovation, pédagogie
Déjà audacieux à ce stade, le projet ne se limite pourtant pas à ses seuls aspects techniques, que ce soit vis-à-vis des enseignants et des étudiants ou du territoire béthunois. « Nous ne voulons surtout pas nous limiter à une simple opération immobilière », insiste Daniel Ammeux ; « cette dernière n’est que la face émergée d’un projet qui regorge d’opportunités. La dimension pédagogique lui est notamment inhérente : EITRE est un moyen de faire de l’étudiant un acteur de sa formation, le plus concrètement possible ».
Autrement dit, étudiants et enseignants vont être directement impliqués sur ce chantier-école au travers d’une formation pédagogique en partie construite sur les différentes phases de l’opération. Même son de cloche du côté des chercheurs qui voient dans l’opération un terrain d’expérimentation prometteur : « EITRE, c’est l’occasion pour les laboratoires de tisser des liens étroits avec les entreprises. Pouvoir travailler l’échelle de la grandeur réelle est très important à nos yeux » se réjouit Didier Defer, directeur du Laboratoire Génie Civil et géo-environnement.
En associant ainsi les élèves, les enseignants, les chercheurs et le tissu économique, l’IUT affiche ses objectifs : créer des synergies entre les étudiants et les entreprises en charge de la rénovation. « Ça va donner de la valeur ajoutée à nos formations. Nous allons partager ce que nous développerons à l’IUT avec le monde économique », explique Daniel Ammeux.
Un transfert de connaissances et de compétences vertueux dont l’IUT compte bien faire un modèle. Au-delà des Hauts-de-France et de ses voisins, EITRE veut aussi ouvrir la voie à d’autres institutions d’enseignement supérieur, à commencer par les 115 autres IUT du territoire : « tous les IUT sont sortis de terre à peu près au même moment et partagent une bonne partie de nos problématiques.
Alors, EITRE ou ne pas EITRE ? L’IUT a répondu à la vieille question de Hamlet : ce sera EITRE.