Mickaël Hiraux : le maire de Fourmies voit tout en rev3
Converti en 2015 à la Troisième révolution industrielle, le maire de Fourmies, Mickaël Hiraux, a lancé sa ville dans une dynamique durable. Au cœur de cette philosophie qu’il a présentée à ses administrés en janvier 2016, la conviction que la troisième révolution industrielle est un puissant moteur de développement économique.
Vous vous êtes intéressé à la Troisième révolution industrielle en 2015, quel a été le déclic ?
La Troisième révolution industrielle reste encore un concept flou pour la plupart des gens. Je n’en connaissais pas moi-même tous le détail il n’y pas si longtemps que cela : c’est la directrice de l’hôpital de Fourmies qui m’en a parlé en 2015. Le sujet m’a vite captivé. Nous en avons beaucoup discuté et je me suis penché en détails sur la démarche lancée par la Région et la CCI.
J’ai vite acquis la conviction que c’était vers quoi nous devions aller à l’échelle de ma commune : le développement durable, les innovations, les nouvelles technologies… Fourmies se situe dans un territoire enclavé où faire venir une entreprise ne va pas de soi. Attirer les entrepreneurs et créer de l’emploi suppose de s’engager dans un créneau différenciant. Dans cette optique, notre premier objectif est de former les Fourmisiens à de nouveaux emplois.
Rev3 est donc principalement un levier de croissance économique ?
Bien sûr ! La Troisième révolution industrielle ne se résume pas à l’écologie. Préserver la planète est évidemment une priorité mais cette dernière doit s’appuyer sur les hommes, leurs usages, leurs nouvelles pratiques économiques.
Il faut créer des opportunités de développement et favoriser l’innovation pour créer un système vertueux. Ce qui suppose un effort de pédagogie d’autant plus considérable que cette évolution concerne tous les acteurs : améliorer l’isolation, c’est réduire la facture énergétique, par exemple. Baisser les charges des locataires, c’est leur permettre de payer le loyer. Nous souhaitons concevoir chez nous pour relancer l’emploi et l’économie. C’est notre avenir économique qui est en jeu, mais ce mouvement prend nécessairement du temps.
Qu’avez-vous imaginé ?
Nous allons développer de nombreux projets : des façades « lowcost » en bois fabriquées localement pour améliorer l’isolation des bâtiments, des toitures végétalisées en lien avec les lycéens de Camille-Claudel, le développement de liaisons douces et d’un pôle d’échange autour de la gare, que nous souhaitons fortement conserver. Les projets se multiplient dans tous les domaines et vont de la création d’un garage solidaire ou d’un un atelier vélo à l’installation de bornes électriques et de panneaux photovoltaïques.
Nous avançons dans les secteurs les plus divers : c’est un mouvement général qui consiste à lancer mille initiatives dans le même temps : changer les ampoules de l’éclairage public, aménager des jardins partagés, ouvrir une ressourcerie avec un atelier d’insertion, favoriser les circuits courts, construire des bâtiments passifs, exploiter les fiches industrielles comme l’ancien Dia, créer un fablab et des espaces de coworking…
Je souhaite mener ce projet avec une association, pour que cela devienne un lieu vivant, animé par des personnes rompues à l’exercice et à l’animation de lieux de ce type. On y travaille pour début 2017 ! Nous travaillons également sur l’éco-mobilité, toujours avec le lycée Camille-Claudel. Nous avons demandé aux lycéens de concevoir un moyen de locomotion 100 % électrique ou à hydrogène, non polluant et sans permis. Enfin, nous répondons à un appel à projet de l’État en vue de construire une ferme photovoltaïque.
Fourmies fourmille d’initiatives…
Nous sommes convaincus que l’innovation est un levier de revitalisation économique et d’emploi et nous croyons en la jeunesse. Nous ne voulons pas voir partir nos jeunes : il y a des pépites chez nous ! Pour accompagner nos projets et obtenir des financements, j’ai engagé une chargée de mission en novembre 2015. Nous sommes désormais une ville-pilote. Nous voulons devenir un exemple et redonner de l’espoir et de la confiance aux habitants de Fourmies comme à ceux des autres villes. Et on y arrive !
La collaboration et la participation des habitants semblent très importantes pour réussir vos projets ?
Cet aspect est essentiel, mais c’est aussi l’un des défis les plus complexes de notre démarche. La participation et l’engagement ne se décrètent pas mais nous faisons tout pour que chacun s’empare de ces différents projets et en comprenne les contraintes techniques et financières. Il faut que chaque habitant, à son niveau, adopte un rôle d’acteur.
Nous regardons ce qui se passe ailleurs – notamment à Lille – sur ces questions. Un de nos grands projets concerne la rénovation du quartier de l’Espérance, intégrée au plan État-Région 2015/2020. Nous voulons créer un éco-quartier avec une cuisine centrale, un groupe scolaire évolutif et un restaurant scolaire, le tout en co-construction avec les futurs habitants. C’est un chantier qui illustre à échelle réelle les enjeux et les défis de la participation citoyenne.
Comment vos projets sont-ils reçus ?
Dans la population, une partie commence à y croire et se dit « pourquoi ne pas réussir la troisième révolution industrielle ? » Une autre partie des habitants de Fourmies se demande ce que je raconte, mais personne n’est contre… J’ai moi-même contacté les « têtes de pont » régionales qui se sont engagées à mes côtés et je peux compter sur le soutien des acteurs du monde économique, particulièrement volontaires.
Nous cherchons à faire changer les mentalités, à réfléchir différemment. Nous allons passer d’une époque où l’on veut tout posséder à une ère où l’on va partager. Comme avec le co-voiturage !
J’incite fortement les acteurs privés à nous suivre et certains jouent le jeu, comme ce magasin qui va prochainement mettre des bornes électriques à la disposition de ses clients sur son parking. Le conseil municipal me suit et nous allons bientôt organiser un séminaire avec Jean-François Caron, le maire de Loos-en-Gohelle, afin d’échanger sur ces questions et notamment sur celle de la concertation publique, qu’il maitrise largement.
Espérez-vous que votre initiative fera tâche d’huile ?
Pour une fois, un territoire amorce un projet sans attendre que quelqu’un vienne le voir. Nous sommes des ambassadeurs au sein de la communauté de communes du Sud-Avesnois. Nous sensibilisons les élus des environs qui commencent à suivre de près ce qui se passe à Fourmies. La dynamique est bien enclenchée et l’image de la ville change petit à petit. Nous allons vite, nous voyons loin. Nous cherchons à faire changer les mentalités, à réfléchir différemment. Nous allons passer d’une époque où l’on veut tout posséder à une ère où l’on va partager. Comme avec le co-voiturage !
Certes, il peut y avoir un surcoût au départ mais nous sommes accompagnés pour les réduire et à choisir ce qu’il y a de mieux pour nous. L’Ademe, Enercoop et le conseil régional nous aident. Il existe une vraie dynamique. Ces prochaines années, nous allons tous devoir changer notre façon de vivre. Tout le monde n’adhérera pas au même moment mais nous pouvons améliorer notre manière de vivre.
Conférence le 04 juin
La ville de Fourmies organise le 4 juin une conférence « Troisième révolution industrielle et territoire, entreprises, élus, habitants, associations : pourquoi et comment s’engager ? » La question sera abordée lors de trois tables rondes, de 16h à 18h30, au théâtre Jean-Ferrat.
Entre autres personnalités, Xavier Bertrand, président du conseil régional ; Claude Lenglet, co-directeur opérationnel de l’équipe Jeremy Rifkin et Hervé Pignon, directeur régional de l’Adème, , seront présents pour évoquer plusieurs thèmes : « TRI ? Quel intérêt pour les territoires ? » ; « La boîte à outils : quels appuis techniques et financiers mobilisables ? » ; « Enjeux opérationnels et problématiques de terrain ».
Entrée libre mais nombre de places limité ! Réservation obligatoire en mairie au 03 27 59 69 03.